Google a eu, jusqu'à un passé récent, une relation plutôt bonne avec les partisans du libre. L'entreprise finance en grande partie la Mozilla Foundation qui gère le développement de Firefox. Avec l'arrivée de Chrome, le navigateur maison de google, les relations se sont détériorés. Puis ce sont les propos de Eric Schmidt, PDG de google qui n'ont rien arrangé : "S'il y a des choses que vous souhaitez cacher à tout le monde, vous ne devriez peut-être pas les faire. Si vous avez vraiment besoin de ce niveau de vie privée, la réalité c'est que les outils de recherche — Google y compris — conservent effectivement ces informations pendant un temps donné et il est important de noter, par exemple, que nous sommes tous soumis au Patriot Act aux Etats-Unis et qu'il est possible que toutes ces informations soient mises à disposition des autorités." Pas franchement du goût des libristes.

Avec sa lettre ouverte et son injonction finale, la FSF semble demander à google d'éclaircir sa position. L'entreprise souhaite-t-elle la liberté de l'utilisateur sur le Web ou simplement assoir sa suprématie ?

Pourquoi libérer VP8.

VP8 est un codec vidéo performant, si la FSF souhaite le rendre libre la première question qui vient est : "où en sont les codecs libres ?" et pourquoi est-ce si important d'avoir un codec libre performant maintenant. L'urgence de la situation vient du fait que le HTML5 arrive et avec lui sa balise vidéo. Google a mis en place une version html5 de youtube basé sur h.264, un codec propriétaire. Ce choix implique que les navigateurs souhaitant pouvoir afficher la balise vidéo devront payer des royalties au propriétaire du h.264. La license est onéreuse et on voit mal la Mozilla Foundation payer 5M/an à la JVT, par exemple. On en vient à la première question. Pourquoi ne pas utiliser un codec libre ? Ogg Theora, le meilleur codec libre est à la rue d'un point de vue qualitatif, quoiqu'en dise la FSF.

La FSF, contre le monopole d'Adobe

Un autre point dévellopé dans la lettre concerne Flash, actuellement application leader de la vidéo en ligne. Silverlight (de Microsoft) a certe sorti de jolies démonstrations (l'occasion pour moi de féliciter France Television pour sa couverture de Roland Garros), mais n'a pas encore fait trembler la technologie d'Adobe. Curieusement c'est d'Apple qu'est venu la première attaque en règle contre Flash. Mais les intentions d'apple sont plus de se faire du fric facile avec des applications vendus assez cher qui copieront les fonctionnalités de certains sites flash, que d'oeuvrer pour la libération d'Internet. Malgrè tout la FSF s'appuie sur cet exemple: en utilisant un monopole, on peut en faire flancher un autre. Assez paradoxalement, dans le cas d'Apple se serait pour augmenter son influence et son emprise sur ses clients et dans celui de google, permettre une certaine concurrence équitable entre navigateurs.

Oui, et après ?

Il semble évident que Google n'a pas racheté On2 pour le plaisir et qu'ils utiliseront probablement VP8 pour Youtube. D'un point de vue stratégique, s'ils veulent que ce soit leur codec qui s'impose à l'heure d'HTML5 et non le H.264 déjà bien en place grâce à Adobe, ils ont aussi interêt à ce que la license soit moins cher que celle de la concurrence. Google a la main, vu qu'ils ont youtube, un mastodonte dans sa catégorie. Ils n'ont certainement pas besoin de la FSF pour faire ses constatations. Mais la missive de la FSF a le mérite de braquer les projecteurs sur la décision cruciale que prendra google.